L’oasis, entre réchauffement climatique et abandon politique

Les oasis sont des zones fertiles dans des étendues arides. Menacés par le changement climatique, ces terrains permettent pourtant à des populations rurales de subvenir à leurs besoins alimentaires. Au Maroc et en moins d’un siècle, deux tiers des oasis ont disparu.

Oasis au Maroc

Dans leur récent documentaire Une oasis d’espoir, Jean-Baptiste Pouchain et Nicolas Van Ingen, racontent l’histoire du Drâa, le plus long fleuve du Maroc, et d’une oasis baptisée Ergsmar. Il y coulait de l’eau jusque dans les années 1970, quand la province décide de construire un barrage en amont de l’oasis. Cet édifice couplé à la désertification, l’oasis est abandonnée. Récemment, des habitants locaux décident de redonner vie au « Petit paradis », comme ils l’appellent. En l’irriguant grâce à de l’eau pompée dans des nappes phréatiques, ils parviennent à cultiver, recréer un écosystème où la biodiversité réapparaît peu à peu. Une belle histoire qui reste exceptionnelle face à la réalité de telles palmeraies.

 

Abandon d’un système ancestral

Il est nécessaire de préciser que l’oasis forme avec sa palmeraie une « bulle artificielle » : c’est l’un des rares écosystèmes où le travail de l’homme est indispensable pour maintenir cette biodiversité. Développées pour leurs potentialités agricoles (culture des dattes, de l’huile d’olive, amandes et des maraîchères), les oasis marocaines sont très riches mais sont loin d’être exploitées à leur maximum de nos jours. Ces cultures reposant sur les palmiers dattiers sont des remparts contre l’avancée de la sécheresse mais la subissent paradoxalement de plein fouet. Deux tiers des oasis du Maroc ont disparu en moins d’un siècle à la fois à cause de la crise de l’eau (tarissement des puits, sources et Khettaras) due au changement climatique mais aussi à cause de la mauvaise gestion des ressources en eaux des Etats. Les Khettaras, ces systèmes d’irrigations ancestraux, sont mal entretenus. Théoriquement, ils épousent la configuration du terrain afin de mobiliser les eaux de pluies et les eaux souterraines pour alimenter la nappe phréatique, mais en réalité, dans les années 60-70, beaucoup ont été laissés à l’abandon au profit des pompages, entraînant une surexploitation sur la nappe phréatique, et provoquant une « utilisation irrationnelle des ressources hydriques déjà rares dans l’oasis »

 

« Le mauvais entretien des systèmes d’irrigation a abouti à leur effondrement physique et la diminution de leurs débits en eau ou même leur tarissement. Dans certains cas, en particulier dans les petits oasis dépendant des petites sources ou khettaras, la crise de gestion d’eau peut aboutir à l’extensification de la mise en valeur agricole ou même l’abandon pur et simple du terrain agricole »

Hein de Haas, professeur de sociologie à Oxford University, dans son article « Gestion d’eau dans les oasis marocaines, migrations et le rôle de l’état : crise ou transformation ? »

Ce phénomène est observable dans de nombreux déserts au Maghreb, notamment en Tunisie et en Algérie. Pour l’heure, un plan « Maroc Vert » a été annoncé et pour la COP22, un projet « l’Oasis durable » est dans les cartons. Des investisseurs ont perçu la possible rentabilité des dattes et ont planté des palmiers sur une zone d’environ 2000 hectares dans le sud-est du Maroc. Quant au Ministère de l’Agriculture, de la Pêche Maritime, du Développement Rural et des Eaux et Forêts du Maroc, il met désormais en place plusieurs programmes de réhabilitation et de sauvegarde des oasis.

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