Pollution environnementale : les stratégies de déresponsabilisation

Marche pour le climat, nettoyage des plages, collectes de déchets…de plus en plus d’initiatives citoyennes voient le jour pour la protection de l’environnement. Une prise de conscience qui s’explique entre autre par la médiatisation du sujet, appuyé par les discours des scientifiques, des associations, des personnalités. Seulement, sont-ils les seuls déclencheurs de ces mobilisations ?

De l’agriculture à l’industrie en passant par le transport, les activités humaines ont un impact considérable sur l’environnement, notamment par les flux polluants qu’ils émettent. Les chiffres de la pollution en temps réel rendent compte de l’ampleur du phénomène. Plusieurs lois ont émergé afin de minimiser cet impact environnemental.Contre la pollution de l’air, le gouvernement a pris plusieurs mesures visant les transports dans le cadre de la loi d’orientation sur les mobilités. Concernant l’agriculture, l’objectif est une baisse de 25% de l’utilisation de pesticides d’ici 2025. Cette mesure du plan écophyto semble d’ailleurs compromise puisque la vente de pesticides est repartie à la hausse en 2017.

Aujourd’hui, le plastique représente un des plus grands fléaux de la pollution, notamment marine. 2 à 4 millions de tonnes de plastiques sont consommées en France chaque année et seulement 22 % de ces matières sont recyclées. La France fait partie des pires élèves d’Europe en matière de recyclage. Dans sa feuille de route pour l’économie circulaire, l’Etat avance un objectif de 100% de plastiques recyclés d’ici 2025. Mais une stratégie développée par les industriels pourrait entraver ce programme.

Le double discours des entreprises sur le recyclage

L’enquête de Sandrine Rigaud, dévoilée dans Cash Investigation le 11 septembre dernier révèle les stratégies des industries et des lobbys pour faire culpabiliser les citoyens et se dédouaner de leurs responsabilités. Le principe est simple : les fabricants de plastique avancent que si les citoyens et les collectivités trient mieux leurs déchets, le plastique pourra être mieux recyclé, à grande échelle. Ils sous-entendent donc que les premiers responsables de la pollution sont les citoyens et qu’ils doivent se mobiliser afin de mieux trier.

Cette culpabilisation des consommateurs n’est pas d’aujourd’hui. Elle date des années 1960. Les lobbys des emballages créer des associations pour contraindre les citoyens à se sentir coupables du désastre écologique. Aujourd’hui, les méthodes utilisées par les lobbys sont bien connues. Les entreprises passent par des scientifiques ou des associations pour porter leur message. Ils financent même des campagnes de “sensibilisation” du public, alors que ce sont les premiers responsables. Les citoyens se concentrent alors sur leur rôle, ce qui évite l’émergence de questions sur les alternatives au plastique. Pendant ce temps, les gros producteurs produisent toujours plus de plastique, et donc toujours plus de déchets.

L’utilisation de l’argument écologique

Autre exemple récent de culpabilisation des citoyens : l’argument écologique du gouvernement sur la hausse du prix de l’essence. Le 5 novembre dernier, Emmanuel Macron a déclaré : « Je préfère la taxation du carburant à la taxation du travail. Les mêmes qui râlent sur la hausse du carburant, réclament aussi qu’on lutte contre la pollution de l’air parce que leurs enfants souffrent de maladies« . Afin de faire accepter cette augmentation, le gouvernement joue donc la carte sensible de l’écologie et insinue que les citoyens devraient moins rouler pour moins polluer. Ou avoir des voitures moins polluantes. Il faut cependant noter que malgré une hausse de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE), seulement 21% va directement à la transition écologique.

On remarque donc une prise de conscience de la part des scientifiques et de la société civile. Leurs mobilisations ont poussé les politiques à s’emparer du sujet, et agir contre la pollution environnementale. Certaines entreprises financent des associations et des campagnes de mobilisation afin de prévenir les incivilités des citoyens et avoir une image positive. Ces programmes ont d’ailleurs engendré de nombreuses mobilisations (ex de Vacances propres). Le fond du problème reste qu’en parallèle, ces mêmes entreprises s’opposent aux mesures qui permettraient de réduire le recours à l’usage unique du plastique, une mesure efficace pour lutter contre la pollution et donc traiter le problème à la racine.

Léa Dubost

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