Pesticides : quel impact sur la santé des agriculteurs ?

Encore illustré récemment par la polémique autour du glyphosate, l’usage de produits phytosanitaires dans l’agriculture pose de nombreuses questions de santé publique aux consommateurs. Mais si les pesticides ont des effets nocifs sur la santé, les premiers touchés doivent être les agriculteurs.

L’usage répété de pesticides peut provoquer certaines maladies professionnelles.

Longtemps le sujet de la dangerosité potentielle des pesticides se cantonnait aux seuls consommateurs. Mais depuis plusieurs années, des études scientifiques tentent d’évaluer l’impact sur la santé des producteurs. La Mutualité sociale agricole (MSA) reconnait déjà plusieurs maladies professionnelles provoquées par l’utilisation de produits phytosanitaires. C’est le cas pour les hémopathies malignes et la maladie de Parkinson liées à la manipulation de pesticides mais aussi de différents troubles respiratoires, digestifs et vasculaires provoqués par l’usage de produits organo-phosphorés. Par ailleurs, les agriculteurs peuvent également être confrontés à des altérations des fonctions cognitives, des ralentissements psychomoteurs ou des troubles de la mémoire engendrées par la manipulation de produits d’entretiens ou de produits pharmaceutiques.

Une surreprésentation de certaines maladies

Aujourd’hui, des études notamment nord-américaines mettent l’accent sur d’autres risques potentiels liés à l’exposition professionnelle de longue durée aux pesticides. Il s’agit principalement d’une surreprésentation de certaines maladies dans la population agricole dont notamment les cancers de la prostate et de l’ovaire, de lymphomes non hodgkinien, de tumeurs cérébrales et de mélanomes.

Toutefois, un lien causal reste à démontrer, car d’autres facteurs de risques présents en milieu agricole peuvent aussi jouer un rôle dans les associations trouvées. C’est le cas de certaines habitudes de vie, de l’exposition au soleil, de l’exposition à d’autres polluants, du contact avec des virus du bétail…

Récemment, une étude épidémiologique française nommée AGRICAN dédiée à la santé dans le monde agricole et dirigée par Pierre Lebailly de Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) a vu le jour. Celle-ci observe globalement une espérance de vie plus importante chez l’échantillon agricole testé que chez l’ensemble de la population française ainsi qu’un taux de mortalité lié au cancer moins important dans la population agricole (-30% chez les hommes et – 24% chez les femmes).

Trop peu d’études sur la santé des agriculteurs bio

En revanche, si la population agricole est moins touchée par certains types de cancers liés notamment au tabagisme (le tabagisme étant moins important en milieu agricole), elle l’est d’avantage sur d’autres types de cancers. On retrouve notamment le mélanome de la peau (+26% chez les femmes), le myélome multiple chez les hommes (+26%), les lymphomes de Hodgkin (+19% pour les hommes et +38% pour les femmes), certains types de lymphomes non hodgkiniens (3% à +32% chez les femmes, +6% à +22% chez les hommes) et les cancers des lèvres (+ 49% chez les hommes).

Aujourd’hui de nombreux agriculteurs font le choix du bio afin d’éviter les contacts répétés avec les pesticides et les fongicides mais peu d’études s’intéressent à la prévalence des maladies professionnelles et des cancers chez ces derniers. Pourtant, une comparaison pourrait permettre de déterminer quelles sont les maladies liées strictement aux produits agro-chimiques et lesquelles sont liées à d’autres facteurs professionnels.

Sébastien Ortiz

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